Passage par la galerie des cartes géographiques du Vatican, sur le chemin de la Chapelle Sixtine, et apparaissent quelques lieux connus, pas nécessairement au bon endroit ou avec la toponymie habituelle. D'où l'envie de comprendre pourquoi, et plonger dans la géographie vers 1580, quand Ignazio Danti a réalisé cette oeuvre monumentale.
L'extrait ci-dessous présente la zone entre le Mercantour et le Queyras, avec très peu de lieux : pour le Mercantour, uniquement le Colle della Nostra Donna della Finestra, puis le Col Agnel (celui entre le Viso et le Queyras), et quatre villes.
Ghigliestra, pour Guillestre, Villauca pour Château-Ville-Vieille et Molines pour Molines-en-Queyras, c'est simple.
Les choses se compliquent pour la dernière ville, nommée ici Cauo delfino. En remontant sur une carte la Durance à partir de Guillestre, l'on tombe sur la confluence de la Guisane et de la Durance, et la ville de Briançon. Laquelle Briançon se nomme plus ou moins ainsi depuis au moins l'époque romaine (Toponymie de Briançon sur Wikipedia).
Et notre nom de Caou delfino évoque un creux et un dauphin, alors que cette espèce est assez rare dans la Durance. Par contre, il y a bien deux ouvrages militaires, Mont-Dauphin à coté de Guillestre et Fort-Dauphin à Briançon qui contiennent ce nom. Le hic, est que ces fortifications ont été construites une centaine d'années après la réalisation des cartes de Danti, et baptisées en l'honneur des dauphins des rois Louis XIV et Louis XV.
De plus, en observant la calligraphie de Caou delfino, l'on remarque qu'elle est plus fine que sur le reste du tableau. Notre conclusion, jusqu'à preuve du contraire : Caou delfino a été rajouté ou modifié discrètement bien plus tard sur le tableau, peut-être pour faire plaisir à un roi de France qui passait par la galerie.
La deuxième carte comporte la zone entre San Remo et Nice, et nous avons tâché de retrouver les villages qui y sont décrits. Facile pour Gorbio, plus compliqué pour Mantegna ou Virga. En zoomant sur la carte, et en cliquant sur les liens bleus, quelques notes sur comment nous avons retrouvé certains lieux. Il en reste quatre, en rouge, qui demeurent un mystère, sauf à ce qu'un lecteur nous donne une solution ?
A noter, entre autres erreurs, la confusion de vallées entre la Roya avec Breil-sur-Roya et Saorge et de l'autre coté la Nervia avec Dolceacqua et Pigna, ou Aspremont sur les bords de la Vésubie.
[1] Un quartier nommé Mantegna aurait existé vers l'actuelle église Notre-Dame à Nice, comme précisé à la page 12 de l'article Lʼurbanisation de Camp-Lonc (XVIe-XXe) d'Archéam.
[2] Les emplacements d'Aspremont, Falicon et de Peillon sont totalement erronés par rapport à la position des villages aux alentours.
[3] Sospel apparaît deux fois sur la carte, avec deux de ses dénominations en italien. Page Wikipedia italienne sur Sospel : "Sospello, in francese Sospel, in mentonasco Sospèl, anticamente Cespitello o Cespedello."
[4] Plus que probablement Perinaldo, le toponyme Peranando n'apparaissant nulle part.
[5] Coaraze apparaît deux fois sur la carte, avec deux de ses dénominations : Coda rasa et Coarasa, la queue du lézard coupé, comme l'explique le site officiel de Coaraze.
[6] Apricale se nomme Avrigâ en ligure, d'où la dénomination Virga. Page Wikipédia en italien sur Apricale.
[7] Quand la République de Gênes acheta Castel Vittorio en 1261, elle la renomma Castelfranco. Page Wikipédia en italien sur Castel Vittorio : "Ribattezzato il feudo in Castelfranco".
[8] S. Audan est probablement Soldano, car se nomme Soudàn en ligure, comme le précise la page Wikipédia en italien sur Soldano.